Lot n° 93
École française circa 1850.
Portrait de Charles-Frédéric-Jules Piontkowski (1786-1849).
Huile sur toile, portant une inscription au dos : « Comte Piontkowski, compagnon d’exil de l’Empereur Napoléon à l’île d’Elbe et à Sainte-Hélène, peint à l’âge de 64 ans ».
H. 57,5 x L. 47,5 cm. Cadre : H. 74,5 x L. 65 cm.
Provenance
Collection privée allemande.
Historique
Charles-Frédéric-Jules Piontkowski, né le 30 mai 1786 au château de Blodensk, est nommé page à la cour de l'électeur de Saxe Frédéric-Auguste III (1750-1827). Ses premières années au sein de l’armée sont peu connues. Il est certain que Piontkowski fut soldat à l'île d'Elbe au bataillon puis à l'escadron Napoléon, puis qu’il revient à Paris avec l'Empereur. Le 16 avril 1815, il est fait lieutenant de cavalerie. Il est ensuite nommé capitaine aux chevaux-légers lanciers : c’est ainsi que le Grand Maréchal Bertrand (1773-1844) s’adresse à lui dans une lettre datée du 23 juin 1815. Il rejoint par la suite l’Empereur exilé à Sainte-Hélène. Bertrand écrit clairement : “L'Empereur me charge de vous prévenir, Monsieur, que vous êtes admis à la faveur de le suivre dans sa retraite.”
Après quelques mois à Sainte-Hélène, Piontkowski fait partie de l’équipage du David qui le ramène en octobre 1816. Il ne semble pas qu’il s’agisse d’un renvoi ordonné par Napoléon puisque ce dernier, par l’intermédiaire de Bertrand, le remercie et le récompense de son dévouement. Le Grand Maréchal lui transmet donc sur ordre de l’Empereur un livret indiquant son élévation en grade dans ces termes : “Le chef d'escadron Piontkowski ayant donné des preuves d’attachement en suivant l'Empereur Napoléon à l'île d'Elbe, depuis à Sainte-Hélène, et ayant dû quitter ce dernier séjour ; l'Empereur n'étant que satisfait de sa conduite, recommande à ceux de ses parens et amis qui verront cet écrit de l'employer dans son grade de chef d'escadron de cavalerie et de lui faire compter une gratification de deux années de ses appointements en écrivant le montant de cette gratification au bas du livret. Enfin il leur recommande de l'aider et de l'assister.”
Le départ de Piontkowski a excité la suspicion des chroniqueurs : un examen rigoureux des correspondances permet d’affirmer que c’est certainement la déclaration qu’il rédige pour les Anglais en avril 1815 la cause de son renvoi. Le 17 avril 1815, Hudson Lowe (1769-1844), gouverneur de Sainte-Hélène sur les ordres de Henry Bathurst (1762-1834), demande à chaque membre de la suite de l’Empereur de rédiger une déclaration écrite indiquant « que c'était leur désir de rester dans l'île et de se soumettre aux restrictions qu'il était nécessaire d'imposer à Napoléon Bonaparte personnellement ». Piontkowski s’exécute et rédige une première déclaration qu’il modifie le lendemain. Il semblerait que ce soit sur les directives de Napoléon lui-même qu’il change le contenu de sa déclaration et que l’Empereur lui en ait dicté la teneur. En juin, cette lettre est lue par Bathurst qui la juge trop véhémente à l’égard du gouvernement anglais. Le 26 juin, il écrit au gouverneur : « Vous éloignerez du général Bonaparte au moins quatre des personnes qui l'ont accompagné, vous remarquerez que je comprends dans ce nombre le capitaine Piontkowski, quoique, à strictement parler, il l'ait suivi quelque temps après le départ du Northumberland ». Il apparaît clairement que la décision d’éloigner Piontkowski n’émane plus de Bathurst que de Napoléon lui-même dans une tentative de restreindre au fur et à mesure le cercle des proches de l’Empereur et notamment les plus politisés.
Littérature
- E. de Saint-Maurice Cabany (Dir.), Le Nécrologe universel du XIXe siècle [Texte imprimé] : revue générale biographique et nécrologique, historique, nobiliaire, généalogique, politique... / par une société de gens de lettres, P. Baudouin, 1845-1870, Paris.
- George Leo de St. M Watson, A Polish exile with Napoleon, embodying the letters of Captain Piontkowski to General Sir Robert Wilson and many documents from the Lowe papers, the Colonial Office records, the Wilson manuscripts, the Capel Lofft correspondence, and the French and Genevese archives hitherto unpublished, Harper Brothers, London and New York, 1912.
- Albert Espitalier, « Un missionnaire de Sainte-Hélène, le chef d’escadron Piontkowski », Revue historique de la Révolution française, Avril-Juin 1913, Vol. 4, No. 14 (Avril-Juin 1913), pp. 237-260.
- Florian Coppée, Napoléon à Sainte-Hélène, réalités et légendes, de 1815 à nos jours. Histoire, Université de Cergy-Pontoise, 2018.